- Laetitia Barret – Efficy (éditeur d’un logiciel de CRM)
- Béatrice Dupuis – Cabinet 37,5 (cabinet de conseil)
Sommaire de l'article
Une bonne relation client doit proposer de l’IA et du self care… mais attention à trop automatiser !
L’étude Elu Service Client de l’Année met en lumière un problème majeur dans la relation client : la difficulté de joindre un service client.
51 % des Français ont déjà abandonné l’idée de contacter un service client.
Les principales raisons :
- 65 % trouvent que c’est trop compliqué de joindre un service client
- 48 % indiquent ne pas pouvoir les contacter par téléphone le SAV
- 38 % sont dissuadés par les numéros payants
- 28% pour l’absence de communication par e-mail ou formulaire web
Cette étude montre que les entreprises doivent impérativement repenser l’accessibilité et l’efficacité de leurs services clients.
Le défi : intégrer l’IA dans sa relation client sans nuire à l’expérience client
- L’IA doit être au service du conseiller.
- L’IA est un formidable atout pour les équipes internes.
- En facilitant les tâches simples et répétitives, elle permet aux collaborateurs de se concentrer sur des missions à plus forte valeur ajoutée, enrichissant ainsi leur propre expérience de travail.
- C’est un levier de fidélisation et de montée en compétences.
- Cependant, Béatrice met en garde contre une réduction trop rapide des effectifs suite à l’automatisation peut nuire à la capacité d’investir dans la relation humaine, essentielle à une expérience client personnalisée et attentionnée.
- Il faut définir stratégie relationnelle globale, et ne pas faire des “POC” ou des coups.
- L’intégration de l’IA ne doit pas être une série d’actions isolées.
- Elle doit s’inscrire dans une stratégie globale de relation client, alignée avec la marque et sa promesse.
La promesse relationnelle est l’engagement qu’une entreprise prend envers ses clients sur la qualité et la nature de la relation qu’elle va leur offrir, au-delà du produit ou service vendu.
C’est ce que le client peut attendre de l’entreprise en termes d’écoute, de reconnaissance, de confiance et d’expérience globale à chaque interaction.
Une promesse relationnelle doit être en phase avec son positionnement et les attentes clients, afin de répondre à leurs attentes.
Une promesse relationnelle forte permet de créer un lien durable, de fidéliser les clients et de se différencier de la concurrence en misant sur la qualité de la relation humaine et émotionnelle.
Pour la MAIF met en avant ses valeurs mutualistes et son engagement sociétal pour créer un lien de confiance et de proximité avec ses sociétaires.
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Technologie et données.
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Les données alimentant l’IA doivent être de qualité, bien structurées et sécurisées.
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Par exemple, un CRM mal alimenté avec des données incohérentes produira des analyses ou des recommandations erronées.
- Avant de déployer une solution IA, réalisez un audit de vos données pour garantir leur fiabilité.
- Par exemple, une mairie utilisant le CRM d’Efficy a nettoyé sa base de données citoyens pour s’assurer que les chatbots fournissent des réponses pertinentes.
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Organisation et talents.
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L’adoption de l’IA nécessite un soutien fort de la direction et une culture d’expérimentation.
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Les équipes doivent être formées et encouragées à tester l’IA, même si cela implique un investissement initial sans retour immédiat.
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Un soutien fort et encadré de la direction : encourager l’expérimentation tout en définissant des limites claires
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L’implémentation d’une culture d’expérimentation. Il faut accepter d’investir du temps initialement, même si le retour sur investissement n’est pas immédiat.
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Il faut tester, apprendre, et laisser les LLM (Large Language Models) s’améliorer.
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→ Une IA qui soulage les équipes.
→ Et des humains qui transforment une interaction en vraie expérience.
Curieux de savoir : quelles situations vous font dire “Là, j’aurais préféré un humain” ?
Les 4 niveaux d’intégration de l’IA dans la relation client
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Le principe est d’utiliser les IA généralistes (ChatGPT, Mistral…) en dehors du CRM ou de la solution de centre de contact
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Avantages : Facilité de mise en œuvre, accessible à tous.
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Limites : Productivité limitée, car l’intégration est manuelle.
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Exemples d’applications :
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Réécrire des courriers standards pour les rendre plus clairs ou personnalisés. Par exemple, Frédéric a cité le cas d’une assurance qui a utilisé l’IA pour reformuler une convocation à une expertise, évitant un ton trop formel.
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Segmenter une base client par secteur d’activité. J’ai partagé son expérience avec Mistral, une IA française, pour catégoriser automatiquement des prospects en fonction de leurs emails ou noms de domaine, réduisant le temps de qualification de plusieurs jours à quelques heures.
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Pour les données françaises, Mistral est particulièrement efficace grâce à son entraînement sur des données locales. Pour des volumes importants, ChatGPT peut être plus performant.
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L’IA est utilisée pour enrichir les données, qui sont ensuite réintégrées manuellement dans le CRM.
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Exemples concrets
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J’ai utilisé Mistral (IA française, excellente pour les données françaises) pour segmenter sa base CRM de 19 secteurs, même à partir d’emails ou de noms de domaine. Un travail qui prenait des heures auparavant est désormais réalisé en 1 ou 2 heures. Cela a permis une communication plus ciblée, augmentant l’efficacité des campagnes marketing.
- J’ai aussi utilisé ChatGPT (plus efficace pour les gros volumes) pour classer les profils (A, B, C, D) en fonction des professions.
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Testez plusieurs IA pour trouver celle qui convient à votre cas d’usage. Par exemple, pour la catégorisation, ChatGPT peut être plus adapté aux gros volumes de données.
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L’IA est connectée au CRM ou au centre de contact via des API ou des webservices, comme des chatbots ou des outils de visioconférence.
- L’IA aide à réduire, filtrer ou supprimer les interactions polluantes comme les appels des personnes qui se trompent de service (énergie vs. réseau électrique), erreurs d’aiguillage, demandes déjà traitées… L’IA peut rediriger automatiquement ou filtrer.
- Avec le temps gagné, les agents auront plus de temps pour traiter des interactions génératrices de valeur et d’émotion comme les appels proactifs pour les clients pour un suivi personnalisé, pour remercier les promoteurs de la marque, pour mener des actions anti-churn…
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Exemples concrets :
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Béatrice a présenté l’usage de la vidéo augmentée par l’IA pour des diagnostics à distance. Un client dans le secteur de l’énergie peut filmer un problème. L’IA analyse la vidéo pour identifier des éléments clés (numéro de série, câbles débranchés), réduisant le temps de traitement et améliorant l’expérience client. Utilisez la vidéo pour les cas complexes (sinistres, dépannages) pour créer un lien émotionnel et réduire les déplacements inutiles. Kiloutou réalise ainsi 25 à 30% des dépannages en visio. C’est une “machine à WoW” qui donne des “yeux” aux conseillers et aide les techniciens débutants qui ont l’aide de leurs collègue à distance.
- Un callbot avec l’IA générative offre un premier niveau de réponse 24h/24, 7j/7 pour les demandes simples (décaler un RDV, horaires d’ouverture, garanties de service). Idéal aussi pour gérer les pics d’appels (ex: demande de carte de tiers payant pour une mutuelle). Il y a une règle d’or, dès deux incompréhensions, passer la main à un agent humain. Les agents doivent être formés à gérer la frustration du client ayant interagi avec un bot, en le considérant comme un “collègue” pour ne pas dénigrer l’outil.
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- On peut utiliser des solutions “low tech” comme le SVI visuel (interface graphique via SMS pour des actions en self-care) ou le RCS (Rich Communication Services) pour une expérience client aussi bonne, mais avec des coûts 10 fois moindres.
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Au niveau N°1, l’IA est directement intégré dans le CRM ou la solution de centre de contact, offrant des fonctionnalités avancées comme le quality monitoring, les résumés automatiques…
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Avec une intégration native, les utilisateurs des CRM et des solutions de centre de contacts sont plus efficaces.
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L’IA peut analyser les emails pour identifier leur tonalité (positive, négative, neutre) et prioriser les demandes urgentes. Par exemple, un client mécontent sera traité en priorité.
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L’IA suggère la prochaine action à entreprendre pour un prospect. Par exemple, pour un client en phase de décision, le CRM peut recommander l’envoi d’un témoignage client.
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Un chatbot intégré permet d’offrir un premier niveau de réponse 24h/24, 7j/7 pour les urgences grâce à la base de connaissances du CRM, du site…
- Certains CRM, comme Efficy, peuvent être connectés aux systèmes de messagerie (Outlook). L’IA est capable d’identifier les données (ex: un nouveau contact) directement dans le corps de l’email et de proposer de les importer dans le CRM. Un gain de temps considérable pour la qualification des contacts.
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Le résumé d’appels pour les conseillers permet de faire gagner du temps (15 à 30 secondes de traitement post appel) et cela enrichit le CRM
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Exemple concret : Dans le secteur des bailleurs sociaux, Efficy a intégré l’IA pour gérer les demandes de maintenance (chaudières, radiateurs) via la visioconférence, réduisant les délais d’intervention.
L’importance de l’IA dans la formation des équipes
L’écoute des conversation permet de compléter les enquêtes de satisfaction.
Le quality monitoring + le speech analytics permettent de passer d’une “double écoute” limitée à un monitoring multi-critères à grande échelle (thématique, humeur client).
On peut enregistrer et réutiliser des appels à des fins de formation.
On passe d’un débriefing occasionnel à un coaching continu, basé sur des données factuelles.
Les agents peuvent s’auto-former ou participer à des sessions de groupe, favorisant l’auto-correction et la recherche de l’excellence.
Cela aide aussi à distinguer les soft skills (le relationnel) des hard skills (les compétences techniques) des agents.
L’IA identifie les mots-clés, les “tics verbaux” (d’accord, voili voilou)… ce qui permet de viser l’excellence relationnelle.
La sécurité des données et la RSE avec l’IA
- Sont-elles réutilisées pour entraîner des modèles publics ?
- Restent-elles anonymisées ?
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Une mauvaise gestion peut entraîner des fuites ou une réutilisation non autorisée, utilisez des IA conformes au RGPD, comme Mistral, hébergée sur des serveurs locaux pour une meilleure confidentialité.
Il faut se demander où l’IA aura le plus d’impact business et si une solution moins sophistiquée ou même alternative ne serait pas suffisante.
Parfois, des solutions “low cost” (comme le SVI visuel) sont 10 fois plus rapides à mettre en place et 10 fois moins chères qu’un bot complexe, tout en apportant une vraie solution au client.
Une bonne relation client, c’est aussi (et surtout) de l’humain !
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La Mutuelle Nationale Territoriale a mis en place un module “Bravo”.
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Quand un client interagit avec un agent (généralement par téléphone), il peut cocher une option pour féliciter spécifiquement l’agent qu’il a eu.
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Ces messages personnalisés (“Merci d’avoir pris le temps, vous êtes si gentil(le)!”) motivent énormément les agents et leur donnent un sentiment d’utilité.
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C’est un puissant outil de diffusion de la culture client en mettant en avant les bonnes pratiques.
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Par exemple, un client a ainsi remercié une conseillère pour sa patience malgré un rhume, renforçant la motivation des équipes.
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La Gestion des émotions chez France Mutuelle.
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Il n’y a pas de script, pas de DMT… le conseiller doit être dans l’écoute active.
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- Solly Azar a expliqué que l’agent doit être dans l’empathie.
- L’entreprise a mis en place un cursus de formation axé non pas sur les scripts, mais sur la posture et la gestion des émotions ressenties par le client.
- Cette capacité à être en phase avec l’état émotionnel du client fait toute la différence et évite la robotisation de la relation.
- Une formation axée sur la gestion des émotions permet aux conseillers d’adapter leur discours.
- Par exemple, pour un client ayant souscrit une assurance moto, le conseiller engage une discussion enthousiaste sur le modèle de la moto, tandis qu’en cas d’accident, il adopte une posture empathique.
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Les gestes personnalisés chez Geodis.
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Ce programme de culture client donne une latitude aux conseillers pour faire des gestes exceptionnels en cas de problème.
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Suite à un décalage de livraison de cuisine, Geodice a non seulement reprogrammé la livraison, mais a envoyé un courrier manuscrit d’excuses avec un set d’ustensiles de cuisine.
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Un geste qui matérialise l’orientation client en interne et crée un effet “waouh” en externe.
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L’adaptation des horaires chez OPCO EP.
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Sans recourir à l’IA, OPCOEP a adapté ses horaires en utilisant ses équipes basées dans les DOM-TOM (La Réunion, Guadeloupe) et en métropole.
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Cela permet de s’adapter aux horaires de leurs clients (de petits commerçants) avec un service humain constant, prouvant que l’ingéniosité organisationnelle peut aussi être une solution puissante.
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- La Sensibilisation à l’Excellence Opérationnelle chez Free Pro.
- Free Pro a investi dans la formation de ses agents au Lean Six Sigma White Belt.
- L’objectif est de leur permettre d’identifier eux-mêmes les irritants et de les transformer en améliorations continues.
- C’est un mélange d’outillage, d’agilité et d’excellence opérationnelle, qui maintient la dynamique de performance au plus près des équipes.
Où agir en priorité ?
Cette grille permet d’identifier les “quick wins” (faible complexité, fort impact) pour des gains rapides en productivité, et les solutions différenciantes (forte complexité, fort impact) qui feront la différence avec les concurrents à long terme. Chacun doit faire ses choix en fonction de ses objectifs.
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Complexité vs impact business.
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Classez les cas d’usage selon leur complexité de mise en œuvre et leur impact sur le business.
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Par exemple, un chatbot pour répondre aux demandes simples (horaires, garanties) est un quick win, tandis qu’un CRM avec IA native pour des analyses prédictives est plus complexe mais différenciant.
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Valeur client vs valeur collaborateur.
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Privilégiez les solutions qui améliorent à la fois l’expérience client et celle des collaborateurs.
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Par exemple, automatiser les tâches répétitives libère du temps pour des interactions humaines à forte valeur ajoutée.
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Ce qu’il fallait retenir pour offrir une bonne relation client
- Béatrice Dupuis :
- Définir sa stratégie relation client afin de savoir clairement où l’on va et pourquoi.
- Engager les collaborateurs, démystifier l’IA, montrer ses bénéfices et encadrer son exploration pour ne pas agir par opportunisme.
- Trouver le juste équilibre entre l’expérience client et l’expérience collaborateur.
- Laetitia Barret :
- Choisir des éditeurs qui embarquent l’IA. Mais ne pas être séduit par des “miroirs aux alouettes”. Réfléchir d’abord à ses besoins réels et au retour sur investissement.
- Oser la curiosité et l’expérimentation… un nouveau monde de l’IA s’ouvre à nous.
- Frédéric Canevet :
- Adopter l’IA de manière responsable, là où elle aura le plus d’impact business, en tenant compte de son coût écologique et économique.
- Ne pas rejeter les solutions “low cost”. Parfois, des alternatives plus simples et moins coûteuses (comme le SVI visuel via SMS) sont plus rapides à mettre en place et tout aussi efficaces pour certaines demandes.
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Béatrice Dupuis (Cabinet 37,5) pour une stratégie d’expérience client.
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Laetitia Barret (Efficy) pour découvrir les solutions CRM IA.
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Frédéric Canevet (Eloquant) pour tester des outils de centre de contact boostés à l’IA.