Pour offrir une expérience client de qualité, il faut des collaborateurs avec la véritable envie de satisfaire le client. En particulier dans le domaine des services ou lors de moments de vérité (avant vente, appel au service client…) où l’humain a un rôle décisif. Tout cela nécessite d’avoir une véritable Culture Client dans l’entreprise.
D’autant plus que lorsque les marchés deviennent concurrentiels et matures, les clients se font plus rares et donc la culture client devient indispensable pour fidéliser le client.
Or cette “orientation client”, n’est pas forcément le fait de toutes les entreprises, ni même de toutes les personnes.
C’est ce que démontrent Daniel Ray et Guillaume Antonietti dans leur dernier ouvrage “Culture Client – Réussir sa transformation” (voir sur ce lien).
En effet, la culture d’entreprise dépend :
- De l’orientation client globale de l’entreprise (pratiques, processus, organisation, management…)
- De l’orientation client individuelle des collaborateurs (personnalité, éducation, humeur…)
Cette orientation client permet aux entreprises de se différencier, un des meilleurs exemples étant les produits “Cest qui le patron” :
Voici ci dessous un rapide résumé du livre de Daniel Ray (Enseignant et Chercheur chez Grenoble Ecole de Management) & Guillaume Antonietti (Côté Client), avec un résumé de leur présentation des 8 commandements pour diffuser une culture d’entreprise orientée client.
Sommaire de l'article
Comment est déterminée la culture client d’une entreprise ?
Voici une vidéo de Daniel Ray qui rappelle la définition de la Culture Client :
Il est important de noter qu’il n’est pas facile de mesurer la culture client d’une entreprise, à l’inverse de la satisfaction client qui est monitorée de près avec de nombreux KPI comme le NPS (voir cet article), le Csat, le CXi…
Pour mesurer l’orientation client des collaborateurs, il y avait certes des questionnaires souvent longs et complexes, mais ils étaient trop compliqués et pas adaptés aux entreprises.
Or plus une entreprise est importantes, plus une elle doit savoir où elle en est au niveau de son orientation client au global, ou selon les filiales, les magasins, les entités…
Car parfois, au niveau de la direction générale, du marketing… il y a des efforts pour plaire au client, cela ne donne pas forcément des résultats… tout simplement parce qu’il n’y a pas de culture client.
D’où l’importance de construire un diagnostic de l’orientation client.
Daniel Ray a donc inventé le COS (Customer Orientation Score), avec Guillaume Antonietti, afin de déterminer la sensibilité client des collaborateurs d’une entreprise.
Le Customer Orientation Score date de 2014, avec au départ plus de 200 questions et 1h30 de diagnostic (mais cela a bien changé depuis, avec bien moins de questions !).
Le premier client a été Kiabi, et désormais ce sont 60 000 collaborateurs et 160 entreprises ont fait le COS (dont les adhérents de l’AMARC, l’Association pour le Management de la Réclamation).
Le COS (Customer Orientation Score), comprend plusieurs volets :
- Le COS company : il mesure de la culture client en interne vu par les collaborateurs. Cela permet de faire une photo de la culture client.
- Le COS recrutement pour recruter les bons collaborateurs via une mesure de l’orientation client individuelle. Cela permet de recruter les bons candidats (internes ou externes).
- Le COS in mind : c’est un parcours de transformation de l’état d’esprit et des attitudes des collaborateurs afin de former et coacher les équipes. C’est essentiel, car souvent la direction demande aux collaborateurs d’être orientés clients, mais ils ne le font pas… Il faut donc sortir des simples injonctions, et changer l’état d’esprit sans avoir besoin de dire et redire qu’il faut être orienté client.
Cette mesure de l’orientation client est essentielle, car souvent les entreprises veulent changer leur culture client, mais elles ne savent pas comment faire…
D’autant plus que personne dans une entreprise n’osera dire qu’il n’est pas orienté client… donc, il y a déjà des limites car le déclaratif montre que personne spontanément ne dira qu’il n’est pas orienté client…
Il faut que cela soit un réflexe, afin de ne pas laisser les mauvais réflexes prendre le dessus.
C’est comme le test de « stroop » : il est très compliqué de dire les couleurs des mots lorsque ces mots sont d’une autre couleur.
Pour la culture client, c’est la même chose… C’est très compliqué de changer car on pense (un peu) au client mais l’on fait ce que l’on peut.
C’est lié au fait que nous avons 2 systèmes de pensée (Daniel Kahneman)
- Système 1 (pensée type 1) : automatique, non conscient, sans effort, traitement rapide, changement lent, évolution ancienne, non verbal, importance des images…
- Système 2 (pensée type 2) : contrôlé, conscient, beaucoup d’efforts, traitement lent, changement rapide, évolution récente, lié au langage, importance des mots…
Il y eu des études qui montrent qu’il y a des préjugés innés, or pour lutter contre ces pensées de type 1, il faut en avoir conscience.
Notre système 1 sert à automatiser nos comportements, en situation de stress, de charge cognitive, de fatigue, de pression sur le temps…
Notre système 1 a comme origine les expériences passées, les postes occupés précédemment, la personnalité…
Mais on peut ne pas être d’accord avec son orientation client implicite (spontanée) mais nous influencera dans des conditions spécifiques (sous stress, en fin de journée…). D’où l’utilité d’être conscience de son COS système 1.
Donc pour être orienté client il faut avoir comme objectif / but prioritaire la satisfaction des clients sur le long terme au niveau du système 1 et 2.
La conséquence est que le niveau d’effort d’un collaborateur pour être orienté client dépendra de son orientation de départ.
Au niveau individuel, le COS utilise plusieurs indicateurs :
- La désirabilité sociale
- La propension à l’intuition
- La cohérence entre le S1 /S2
- L’orientation client système 1 et son ambivalence
- L’orientation client système 2 et son ambivalence
- …
Ces orientations système 1 sont généralement complexes à changer, sauf suite à une expérience émotionnelle ou un stress important.
Les 8 commandements d’une culture d’entreprise orientée Client
Le livre de Daniel Ray et Guillaume Antonietti est une feuille de route avec les témoignages d’entreprises, les 8 commandements ci dessous en sont une synthèses.
1 – Managers soyez exemplaires !
C’est un des fondamentaux de la culture client : les managers et la direction doivent prendre le sujet en main.
Par exemple, une entreprise dans le domaine du luxe avait un COS de 36 alors que la moyenne du secteur était de 50 sur 100.
L’entreprise a mis en place un plan d’actions, avec une réunion de la direction et des managers… Ce qui débute par une présentation des enjeux, et delà les managers comprennent l’importance de l’orientaiton client, et d’accord pour travailler ensemble sur le sujet. C’est à ce moment là, que le directeur de l’entreprise part en laissant les collaborateurs se débrouiller seuls, alors qu’il devait au contraire être le moteur du changement !
A l’inverse, la culture de décathlon, c’est de démocratiser le sport… et une année le DG a indiqué que l’entreprise avait un problème : elle faisait trop marge ! Le but de l’entreprise n’était pas de faire des bénéfices, mais de démocratiser le sport ! Il fallait donc réduire les prix.
Il y a aussi l’exemple d’Uneo qui est l’assureur des militaires.
Lorsque la concurrence est féroce, il faut voir une culture client avec une démarche orientée « adhérent ».
Le but n’est pas de changer les logiciels, les process… mais de changer la culture client.
Cette démarche lancée chez Uneo date de 2018, avec une entreprise qui était à la base « mono produit », mais qui propose désormais plusieurs gammes de produits…
Il fallait franchir une étape supplémentaire au-delà des enquêtes de satisfaction, de l’écoute client…
D’où l’usage du COS qui permet de rentrer de mesurer la culture de l’entreprise avec la mise en place de réflexes (le fameux système 1).
Cela a débuté par une étude COS, cela a permis de faire un benchmark par rapport aux concurrent, avec les comportements des managers versus ceux des collaborateurs.
Cela a commencé par la mesure du COS auprès de la direction générale, puis cette mesure est étendue aux managers, car les hommes, c’est ce qui fait la différence. Ce ne sont pas uniquement les process et les logiciels ou les produits.
Cela permet d’avoir une cartographie de la culture client, afin de savoir où agir en priorité.
Le premier réflexe est donc de mesurer sa culture client, tout comme le MBTI donne une grille de lecture sur sa personnalité, le COS fait la même chose mais sur la culture client.
Mais pour cela, il faut que la direction générale, les managers… portent cette volonté au coeur de l’entreprise.
D’où l’importance d’être exemplaire, et par exemple appeler les clients contents et mécontents, afin de prouver qu’il faut se mettre au service client.
2 – Tous concernés
On pense souvent que ce sont les collaborateurs orientés clients qui sont priorités, mais non tous les collaborateurs sont concernés, et dans tous les services (ex : DRH, compta…).
Pour cela, il faut prioriser l’orientation client plus que que les performances.
Par exemple, il faut mettre des références “expérience client” dans tous les services, et les intégrer dans les communications sur le sujet.
3 – Il faut prouver que la culture client cela rapporte.
La démonstration de la rentabilité de l’Expérience Client doit être prouvée par les chiffres.
Il y a certes les études qui montrent que les entreprises qui sont les plus orientées clients sont les plus rentables, mais cela doit être démontrée dans l’entreprise.
Par exemple, on peut le comparer entre les entités commerciales d’une même entreprise.
Par exemple, le Crédit Agricole du Nord Est a fait une étude entre l’orientation client des collaborateurs et l’équipement des clients en produits financiers.
Cette étude a permis de prouver que les agences orientées clients performent mieux que la moyenne : le taux de mono bancarisé (les clients avec juste une seule banque) était le plus important que dans les agences moins orientées clients.
4 – Des KPI oui, mais il ne faut pas se tromper de guerre.
Il y a des indicateurs de performances comme le NPS, mais ce n’est pas l’orientation client…
D’autant plus que les collaborateurs qui se savent notés sur le NPS ont tendance à demander aux clients de mettre de bonnes notes… ce qui biaise les chiffres
Ainsi, à la Compagnie des Alpes, il y a eu la mise en place de la mesure de la satisfaction, mais pas que sur les pistes.
La satisfaction a été mesurée sur l’ensemble du parcours vacancier, de la préparation au voyage jusqu’au départ.
Il y a une nouvelle question qui a été intégrée “Sur une échelle de 1 à 10 direz vous que la station a comme véritable objectif d’assurer votre satisfaction ?”
C’était certes proche de la question sur l’accueil… mais les résultats montrent que c’est vraiment différent car cela va au-delà de l’expérience d’accueil du client.
Cela mesure l’effort que doit faire la station de ski pour satisfaire ses vacanciers.
Cette réponse est fortement corrélée sur la satisfaction et la recommandation. C’est désormais suivi de près dans toutes les stations de ski.
5 – Vive les réclamations !
L’exemple mis en avant a été celui du Directeur Général du groupe “4 seasons”, qui gère 600 collaborateurs et va néamoins garder un oeil sur les réclamations.
Une chose qui est importante dans le domaine de l’hotellerie, c’est d’être sûr que le séjour se passe bien, et ne surtout pas attendre le départ du client ou la fin du séjour pour vérifier s’il est content.
Il faut suivre la satisfaction dès l’arrivée (ex: demander au client d’où il vient, pourquoi il vient en vacances…) afin d’offrir un service personnalisé.
Durant le séjours, il faut saisir au vol ses préférences, car ce sont des pépites d’or qu’il faut attraper eu vol lors des conversations (ex : le client dit “j’adore voyager et j’aime aller en Inde” et par exemple lui faire un repas Indien, ou encore s’il aime le chocolat lui faire un petit cadeau de chocolats…).
Mais cela peut être la gestion des réclamations (ex : je n’aime pas ma chambre…), et donc le CODIR passe en revnue tous les matins les commentaires clients positifs et négatifs… et s’il n’y a pas d’irritants, ce n’est pas normal…
Il faut utiliser ces feedbacks clients pour rectifier la situation.
Mais pour cela il faut avoir une culture de confiance où l’on peut indiquer l’insatisfaction des clients et oser le dire que l’on s’est planté.
S’il y a 2 insatisfactions c’est le manager qui présente ses excuses au client, et s’il y a 3 insatisfactions, c’est le directeur de l’hôtel qui vient en personne.
On fait tous des erreurs, mais le fait de se déplacer et d’aller s’excuser qui fait la différence, cela suffit parfois, même sans offrir de compensation financière.
Ensuite ces informations sont rentrées dans le CRM (voir cette liste de solutions de CRM) afin de s’assurer que cela ne se reproduit plus.
Quand il y a une erreur, il faut se comprendre pourquoi et identifier comment s’améliorer.
6 – S’attaquer eu « hard », c’est à dire aux processus.
Ainsi, chez Bouygues Construction le niveau de culture client n’était pas évident car il y avait une distance importante avec le client (temporelle, physique…).
De plus, dans la construction les process sont sacrés, et donc lorsque l’on parle de sentiments, d’émotions… ce n’est pas facile de se faire entendre, et de faire passer cette notion de culture client.
Il faut donc transformer les processus qui étaient une contrainte pour en faire une force.
Tous les processus étaient orientés produits, et donc il fallait tous les refaire pour les orienter client.
C’est un passage culture projet à culture client :
- Désiloter les services, par exemple quand on livre un projet, c’est la fin du process. Le commercial a changé de rôle vers plus de suivi.
- Le service juridique est très puissant dans le bâtiment, et lors du COVID tous les chantiers se sont arrêtés. Il fallait corriger les courriers entre le service client et le service juridique afin de les rendre plus orientés clients. Cela montre défendre la marge de l’entreprise et le client sont compatibles.
7 – Provoquez des éruptions de culture client
L’exemple pris est celui de la MAIF qui a remboursé les primes automobiles des personnes qui ne pouvaient plus conduire durant le COVID.
Les collaborateurs avaient une culture client, et donc ils ont trouvé des bonnes solutions pour appliquer cette idée, sinon ils auraient trouvé tous les prétextes possibles pour ne pas le faire.
C’est comme le Crédit Mutuel qui ne fait plus de questionnaire de santé pour les personnes qui sont clients depuis plus de 7 ans… il faut faire confiance au client.
8 – Développez le bon sens client
L’exemple pris a été celui de Malakof humanis : 80% de l’enchantement vient du relationnel.
Or les formations sont surtout basées sur l’attitude dire bonjour, au revoir… alors que ce n’est pas ce qui fait la différence.
Comment transformer une culture client ?
Il fallait faire passer le COS au Top 300 de l’entreprise, puis faire passer les conseillers clients au COS in Mind.
C’est un programme sur la durée pour faire changer les postures et les mentalités : il y a des questions tous les jours pendant 6 semaines, avec un ancrage plutôt qu’une formation.
Cela permet de changer l’orientation client, et ainsi de voir au bout de 2 semaines les évolutions (ex: les clients merci !), et une évolution du NPS.
Les collaborateurs font tous les jours « la minute client » , d’autres appellent le client au lieu d’envoyer des emails, encore d’autres dont des raconte-moi ce qui s’est passé dans les 6 derniers mois et ce que tu as fait (la meilleure histoire permet d’expliquer le geste ce qui permet de faire passer le message car c’est une formation entre pairs).
Vous voulez en savoir plus ?
Vous pouvez commander le livre “Culture Client – Réussir sa transformation” (25) € sur ce lien
Vous pouvez également visite le site du COS – Customer Orientation Score.
Et écouter cet échange avec Daniel Ray