J’ai le plaisir de recevoir Jonathan Lefèvre, consultant et auteur du livre “L’obsession du service client“. Dans cette interview, il nous confie quelques-uns de ses conseils pour transformer son service client en avantage concurrentiel.
Sommaire de l'article
Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Jonathan Lefèvre et je travaille dans la tech depuis une dizaine d’années, sur des sujets qui tournent essentiellement autour de l’expérience client et des outils de productivité.
J’ai notamment travaillé dans une entreprise qui s’appelait Capitaine Train, où je m’occupais justement de l’expérience client.
Notre obsession du service client nous a donné un destin inespéré, au point qu’un éditeur a fini par me convaincre de raconter tout ça dans un livre “L’obsession du service client”.
Voici un des avis laissés sur le livre :
Quels sont les défauts dans la gestion d’un service clients et pourquoi peinent-ils à vraiment satisfaire leurs clients ?
Les avancées technologiques des dernières décennies ont tendance à renforcer l’importance de l’expérience client dans les décisions de consommation.
L’information étant de plus en plus fluide et transparente pour les clients, il devient de plus en plus difficile — côté entreprises — de survivre en proposant une expérience client médiocre.
Les entreprises à succès de ces dernières années sont souvent celles qui considèrent l’expérience client non pas comme un centre de coûts, mais comme un centre de profit.
Or la plupart des entreprises sont encore enfermées dans l’ancien paradigme : celui dans lequel la structure agit d’abord en fonction de ses propres intérêts, sans forcément réfléchir à ceux de ses clients.
Un monde où n’importe quel client insatisfait est capable de déceler un manque flagrant d’empathie.
Voilà pourquoi la plupart des services clients sont externalisés, standardisés, lents, et incapables de répondre aux questions pour lesquelles on essaie pourtant de les joindre.
Pour la plupart de ces entreprises, ce n’est même pas une question d’incompétence — c’est juste qu’elles ont été construites sur des paradigmes différents.
Dans beaucoup d’entreprises, la douleur du client se retrouve diluée entre plein de personnes différentes.
Individuellement, elles sont rarement de mauvaise volonté, mais elles se limitent à leur périmètre, renvoient la balle vers d’autres services, et n’ont aucune visibilité sur le parcours du client dans son ensemble.
De fait, elles n’ont aucune idée de l’expérience globale que le client est en train de vivre, et on se demande si quelqu’un y a déjà réfléchi.
Si on tire le fil jusqu’au bout, on remonte à des problématiques RH de culture d’entreprise : des paradigmes fondamentalement cassés autour de questions comme les droits d’accès, la transparence de l’information, l’autonomie dans les décisions, ou encore les KPI de coercition…
Quelles sont selon vous les clés pour offrir un service client qui va enchanter les clients ? Quelles seraient vos 5 recommandations clés dans la gestion d’un Service Client ?
- Utiliser son propre produit, pour en devenir un expert sans devoir se forcer.
- Faire du service client une préoccupation de tous les salariés de l’entreprise, pas juste ceux du service client.
- Prendre le temps de résoudre les problèmes à la source.
- Investir massivement dans les outils internes du support (back-office, base de connaissances).
- Agir plutôt que promettre. Admettre ses erreurs et communiquer avec un maximum d’authenticité.
Les méthodes que vous préconisez dans votre livre semblent faciles à mettre en place dans une startup. Comment appliquer ces méthodes dans une entreprise qui a déjà un historique et une organisation en place pour la gestion de son service clients ?
C’est effectivement difficile, car ça implique :
- de ne pas limiter sa réflexion au service client en tant que tel — il faut nécessairement l’élargir au fonctionnement global de l’entreprise ;
- de remettre en question certaines fondations organisationnelles et managériales de l’entreprise. Certains paradigmes devront au moins être bousculés (si ce n’est complètement reconstruits) et comme tout changement d’habitude profond, c’est assez douloureux.
Mais certains y arrivent, comme les entreprises dont parle Frédéric Laloux dans “Reinventing Organizations“, un livre que je conseille à tout le monde :
Voici le résumé du livre :
Et un des avis de clients :
On dit souvent “best service is no service”, comment faites-vous pour éliminer les points noirs du parcours client ?
Il n’y a pas de secret : il faut prendre le temps d’éliminer CHAQUE friction.
De s’attaquer à la moindre imperfection du produit qui, par un certain manque de clarté, pourrait donner lieu à une incompréhension du client (et donc une sollicitation du service client).
Personne n’a envie de contacter un service client pour le plaisir.
Quand ça se produit, c’est forcément qu’il y a eu un couac quelque part, d’une manière ou d’une autre.
Chaque contact au service client doit être vu comme la conséquence d’un échec du produit.
Cela peut être un bug, une erreur de design, une fonctionnalité manquante, un problème d’ergonomie, un message d’erreur mal écrit, un menu pas assez clair, un mauvais choix d’UX…
Parfois, ça ne se joue à rien du tout.
L’important est d’avoir cet état d’esprit consistant à résoudre les problèmes à la source, de façon à ce qu’ils n’arrivent plus jamais à l’avenir.
Le service client est une incroyable matière première (tellement sous-estimée !) pour identifier et éliminer tous ces problèmes.
Selon moi, c’est même son véritable rôle, du fait de sa position ultra privilégiée pour améliorer le produit.
Cet aspect est souvent négligé par la plupart des boîtes.
Elles commencent à changer d’attitude — souvent trop tard — lorsqu’elles se rendent compte que la croissance de l’équipe support ne peut économiquement pas suivre la même courbe de croissance que celle du produit ou des nouveaux clients.
Comment créer un effet WOW grâce à son service client ?
Un effet WOW, par définition, c’est quelque chose qui surprend.
Quelque chose auquel on ne s’attend pas.
Et paradoxalement, une des meilleures façons de surprendre positivement ses clients selon moi, c’est d’y aller doucement avec les promesses.
De se contenter d’être fiable dans la durée, de faire du bon travail en gardant une certaine humilité, sans forcément chercher le WOW à tout prix.
La plupart des entreprises ne lésinent pas sur les belles promesses (qui sont effectivement plus séduisantes à court terme qu’un « on fait juste bien notre travail »)… sans être forcément capables de les tenir.
C’est exactement ce qui finit par altérer ce qui compte vraiment : la relation de confiance avec ses clients sur le long terme.
Je préfère les entreprises qui promettent peu, mais qui exécutent parfaitement ce qu’elles promettent.
Et lorsqu’elles arrivent à faire encore mieux, c’est là qu’elles créent de véritables effets WOW.
Vous voulez en savoir plus sur Jonathan Lefèvre ?
Le mieux est d’aller sur mon site jonathanlefevre.com. Il regroupe tout ce que j’ai écrit ainsi que mes différentes activités.
Bonus – La synthèse du livre “L’obsession du service client”
En Bonus, voici ci dessous une présentation Powerpoint qui synthétise le livre et la philosophie de Jonathan concernant la gestion d’un service client :