J’ai eu le plaisir d’interviewer François-Xavier SCHERPEREEL, Directeur de l’Expérience Client.
Lors de cette interview, François Xavier explique quels sont les challenges pour les Directeurs de l’Expérience Client pour 2018.
Sommaire de l'article
1 – Est-ce que tu peux te présenter ?
L’expérience client ; « je suis tombé dedans étant petit » comme dirait Obélix (je suis fan de BD).
Mon credo : placer le client au centre des préoccupations de l’entreprise, être au service des clients dans l’ensemble de leur parcours, dans l’intérêt du business de l’entreprise et de ses salariés.
C’est en effet au service du client que j’ai forgé mon expérience depuis maintenant 20 ans.
Diplômé de Sup de Co, j’ai d’abord intégré un groupe de concessions automobiles en 1997 comme Directeur commercial adjoint avant de rejoindre EPSON France en mars 2000.
J’y ai pris la responsabilité du service client au sein de la Direction des services et support client.
En 2004 j’ai eu en charge la stratégie de support technique d’Epson Europe et créé un centre outsourcé de 350 personnes pour les clients BtoC et BtoB des 26 pays de la zone EMEA.
En 2006, je change d’univers en créant la Direction de la Relation Client chez Colissimo (branche colis du groupe La Poste) où je définis la stratégie de relation clients pour accompagner le développement des clients e-commerçants et des 4 centres de relation clients internes et externes.
En 2014, je reprends la direction de la Relation Client d’Oscaro.com (pure player, N°1 des ventes de pièces automobiles sur Internet).
Je structure la direction et mets en œuvre la stratégie de relation client pour la France et l’international.
J’ai également la responsabilité de structurer et superviser la filiale de service 3C.com (prestations de services centre d’appels).
Comme tu le vois, j’ai eu l’occasion de travailler dans différents secteurs d’activité, d’environnements et de cultures d’entreprises très différents, toujours attaché à porter la voix du client et à travailler de manière transverse avec les autres directions métiers.
Aujourd’hui j’accompagne les entreprises dans leur stratégie à la mise en œuvre de leur expérience client.
2 – Quels sont les rôles et challenges d’un Directeur de l’Expérience Client ?
Selon moi, voici le rôle d’un Directeur de l’Expérience Client.
Le directeur de l’expérience client est le garant d’une orientation globale de l’entreprise tournée vers le client.
Il est le garant la stratégie client, au delà de porter la voix du client, il le représente et anime la culture client.
C’est un rôle stratégique et bien plus large que celui – pas moins important de la relation client – car il est transverse à l’organisation.
Le directeur de l’XP doit à la fois comprendre la stratégie de l’entreprise et avoir la capacité de faire des feedbacks clients vis à vis de la marque pour peser dans les décisions stratégiques puis au sein des différents services
Savoir expliciter ce que ressentent LES clients car ils sont pluriels et divers que les groupes d’individus constitués par les systèmes de segmentation.
Ce rôle est à mon sens tellement important dans les entreprises qu’il doit être rattaché au plus haut niveau de l’entreprise, c’est à dire la direction générale et ne pas dépendre de directions métiers telles que marketing ou opérations.
En ce qui concerne les challenges d’un Responsable de l’Expérience Client, voici pour moi les 3 éléments clés :
- Mettre en place les actions et piloter les indicateurs orientés clients.
- Porter et diffuser la culture client de manière transverse en “de-silotant” l’organisation habituelle des entreprises.
- Etant garant de la voix du client, il aura à porter sa voix dans les décisions stratégiques de l’entreprise.
Si j’avais 6 conseils à donner à un Directeur de l’Expérience Client fraîchement nommé, voici ce que je lui conseillerais en priorité :
- Viser l’excellence opérationnelle.
- Faire en sorte que la promesse client soit tenue et mettre en œuvre les processus d’amélioration continue qui permettront de les tenir et les maintenir.
- Instaurer une proximité entre les clients, l’entreprise et les collaborateurs de l’entreprise.
- Notamment par le biais de l’accessibilité client qui souhaitent un service personnalisé (où je veux, quand je veux, comme je veux…).
- On retrouve donc également la notion très forte et accentuée par le digital de l’immédiateté.
- Connaissance client et Data.
- Mettre en place les processus, les outils, la responsabilisation des équipes qui permettront de capter les éléments de contentement ou non des clients et ainsi de connaître et déterminer les axes d’amélioration, d’innovation et de personnaliser donc de valoriser le client.
- Intégrer des KPI’s orientés client, au delà des indicateurs que nous connaissons tous dans nos structures.
- Par exemple intégrer des indicateurs de ressenti, de retour client comme le NPS (Net Promotor Score) ou encore le CES (Customer Effort Score).
- Ce sont autant d’avancées nécessaires à la diffusion de la culture client dans l’entreprise.
- Ils doivent faire prendre conscience à chacun des “silos” de l’entreprise du fait qu’ensemble à penser client ils trouvent des solutions.
- Rester pragmatique et proche du terrain, co-construire.
- Il ne s’agit pas d’élaborer des process en labo puis de les faire appliquer par les équipes, cela ne fonctionne pas car on est trop éloigné de la réalité.
- Ecouter les différents acteurs, analyser et synthétiser pour ensuite communiquer avec pédagogie.
3 – Pourquoi est-il essentiel de travailler le parcours des clients et des utilisateurs, et non pas juste avoir une vision “client” ?
Avoir une vision client me semble une approche dépassée qui correspond plus à la période où les entreprises plaçaient le produit au centre de leur stratégie, et tentaient tant bien que mal “d’éduquer” les clients à leur produit, avec plus ou moins de succès.
Aujourd’hui nous sommes dans un monde ouvert, communicant et omnicanal.
Les nouvelles technologies, dont nous nous sommes tous emparés en tant qu’utilisateurs et consommateurs, nous ont ouvert des perspectives, laissant une plus large part à l’information, l’autonomie, au choix, on peut “liker”, donner un avis, commenter, devenir influenceur en quelque sorte.
Il est donc essentiel de retravailler en transverse les parcours clients / utilisateurs des services.
L’entreprise ne doit pas non plus en perdre son libre arbitre, mais écouter ses clients, prendre en compte les remarques et remontées de ses collaborateurs.
Travailler les parcours clients types c’est designer les interactions et la relation client avec une entreprise, des étapes connues de renseignement avant achat en passant par le tunnel d’achat, mais, et on l’oublie souvent, à ce que j’appelle le tunnel d’utilisation qui peut être plus ou moins long en fonction des produits (louer ou acheter un véhicule).
L’analyse de ces étapes est stratégique pour l’entreprise pour tenter d’offrir le fameux service sans couture.
On voit bien que ce sujet est transverse aux différents métiers de l’entreprise.
On ne peut donc plus avoir une vision unilatérale des choses, ni vis à vis des clients, ni vis à vis de ses collaborateurs dans l’entreprise.
4 – Est-ce que tu pourrais partager 5 bonnes pratiques pour diffuser une culture client dans une entreprise ?
Ma conception de la culture client c’est un état d’esprit qu’il faut diffuser, diluer à toutes les fonctions de l’entreprises pour quelles se mettent au service du client qu’elles soient ou non en lien direct avec eux.
Il y a quelques temps on parlait de mettre le client au cœur des préoccupations de l’entreprise, c’est d’abord
- Placer le client dans tous les processus
Dès l’embauche des nouveaux collaborateurs, s’assurer qu’ils ont un état d’esprit orienté client / service.
Lorsqu’ils intègrent l’entreprise, les mettre en situation d’entendre, voir ce que disent les clients par de la double écoute en centre de contact, échanges avec les conseillers clientèle, travailler avec les équipes marketing.
Ensuite je conseille de réitérer les expériences ; déplacement de personnels en clientèle avec des commerciaux etc…
D’autres initiatives comme chez Air France ont intégré un siège spécifique qui représente le client ou encore Le Club Med qui invite ses clients dans ses comités de direction.
Ces regards croisés, permettent à la fois aux équipes de mieux se connaître et de mieux appréhender les clients.
Enfin une méthode intéressante : lors de comités de direction, écouter quelques appels clients lorsque cela est possible…
Il y a de multiples façons de pouvoir provoquer cette prise de conscience générale qui engendre inéluctablement des évolutions de vision, de tournure d’esprit ou de comportement.
- Responsabiliser les équipes et en premier lieu les équipes au contact direct avec les clients.
Une bonne pratique qu’ont compris et mis en application les grands noms des GAFA, tels que Amazon.
Faire confiance et donner des moyens aux équipes en “Front line” porte très rapidement ses fruits, le ROI pour l’entreprise : ça lui rapporte,
- les salariés se sentent considérés – j’ai pu moi-même constater que les salariés “s’auto contrôlent”,
- les clients ont une réponse rapide et efficace, voire surprenante dans certains cas
- pour l’entreprise c’est finalement une simplification à un coût généralement plus faible qu’un modèle structuré
- les équipes sont les ambassadeurs de votre marque, ils influencent et véhiculent l’image de l’entreprise.
- Co-construire les parcours clients, les offres, les solutions
Prendre en compte la vision client, mais également travailler sur la vision collaborateur
Je suis un grand adepte de la pratique du “test & learn” qui consiste à observer un phénomène, tenter de trouver des réponses, de le tester et l’améliorer de manière itérative ou voire l’abandonner si cela ne fonctionne pas.
Réintégrer les directions métiers souvent de côté comme les DAF / équipes techniques.
Impliquer les collaborateurs, est important pour la réussite globale des projets co-construits.
On va par exemple rapidement constater que certains outils mis à disposition des collaborateurs, certaines procédures ne sont pas suffisamment orientées clients.
- Mesurer la satisfaction client, diffuser largement des feedbacks clients
Le niveau de satisfaction général, le promouvoir, l’explorer dans les différentes phases du parcours client, relever les points positifs et sur lesquels les clients sont attachés et finalement travailler les axes d’amélioration.
Ces mesures et indicateurs doivent permettre de faire circuler la voix du client.
Elle donnent également le niveau d’intensité à donner et donc les priorités pour agir, corriger, améliorer.
- Créer le lien humain entre les collaborateurs et les clients
La culture client est un projet d’entreprise qui doit permettre à l’ensemble de la structure de se réinventer, savoir se remettre en question.
5 – Quelles sont pour toi les tendances fortes en matière d’optimisation de l’Expérience Client pour les mois à venir ?
RGPD qui entrera en vigueur en Mai 2018 va offrir également l’occasion à l’expérience client de s’exprimer dans les entreprises.
Pour les entreprises cela nécessite d’inventorier toutes les occasions au cours desquelles elles collectent des informations sur leurs clients, mieux en cerner l’utilité, savoir comment elles sont exploitées et à quelles fins.
Elle redonne aussi le pouvoir au client, son consentement devra être explicitement accordé.
In fine c’est une formidable occasion de retracer, voir retravailler les parcours clients pour les entreprises qui est donnée par le RGDP.
Vous voulez en savoir plus ?
Vous pouvez poser vos questions sur l’optimisation de l’Expérience Client à François-Xavier SCHERPEREEL.